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  • Madeleine Hamel

Ma chère petite...

Dernière mise à jour : 26 oct. 2023


Aujourd’hui, à la Galerie, sont venues une artiste et sa fille. La petite (je dis « petite » mais elle avait 25 ans) me racontait qu’elle faisait du burlesque mais qu’elle avait dû arrêter à cause d’un professeur qui l’avait traumatisée. En fait, cette professeure lui avait dit qu’elle n’avait pas de talent dans ce domaine, alors qu’elle ne lui avait accordé que 5 minutes pour lui montrer la chorégraphie avant le spectacle.

C’est une jolie fille blonde, discrète, toute en nuances avec une écoute hors du commun. Elle vous regarde avec ses grands yeux, une émotion sur deux pattes. La petite (rien de péjoratif dans ce titre car comme j’ai 62 ans, une jeune fille de 25 ans m’apparaît comme quelqu’un qui a toute la vie devant elle); donc la petite semblait blessée, à juste titre, par cette étiquette que quelqu’un en autorité avait trop hâtivement posée. Mon cœur de « mère » et de « mentor » s’est empressé de lui dire que lorsqu’une porte se fermait c’était parce qu’une autre allait s’ouvrir et qu’il fallait réaliser ses rêves, peu importe l’âge (regardez-moi, j’ai 62 ans et je réalise un rêve que je jugeais inaccessible de devenir propriétaire d’une galerie d’art).

C’était une bonne intention de ma part, mais c’était sans mesurer la « pagaille » qui s’installe entre les deux, comme le dit si bien Marguerite Duras. Il y a toujours un moment de doute, de néant où on ne sait trop ce qu’on va faire, ce qu’on doit faire, un vague-à-l’âme qu’il faut digérer avant de passer à autre chose. Parfois, ça arrive sans que tout soit complètement réglé, comme un message lancé dans l’univers qui vous arrive à un moment inopportun, qu’on n’avait pas prévu dans le temps.

J’ai parlé de Foi, pas de celle qu’on relie à la religion, mais de celle dont on sent l’appel dans son « très-fond », de celle qu’on entretient malgré les embûches, comme un jardin qu’on arrose en enlevant les mauvaises herbes, parce qu’on sait profondément que des fleurs magnifiques pousseront justement parce qu’on a su l’entretenir.

L’appel de l’art c’est comme l’appel du large :

Un matin nous partons, le cerveau plein de flamme, Le coeur gros de rancune et de désirs amers, Et nous allons, suivant le rythme de la lame, Berçant notre infini sur le fini des mers.

Mais les vrais voyageurs sont ceux-là seuls qui partent Pour partir, coeurs légers, semblables aux ballons, De leur fatalité jamais ils ne s’écartent, Et sans savoir pourquoi, disent toujours : Allons ! (Charles Beaudelaire)

L’art c’est une passion quand tout nous pousse vers le contraire, l’opposé, que la réalité et la logique nous forcent à voir le côté rationnel des choses. L’art c’est quand, malgré tout cela, on persiste et persévère.

Ma petite, quand tu es partie tu m’as dit que j’étais inspirante, mais je voulais m’excuser de ne pas t’avoir dit que j’espère seulement t’avoir fait sentir qu’il n’y a pas plus belle et sereine décision que de continuer dans ce qui nous « drive ». Je sais que tu rencontreras encore sur ta route des gens qui essaieront de te dissuader du contraire, c’est la vie! Et peu importe si tu décides d’en faire un métier ou un loisir, l’important c’est que tu laisses de la place dans ta vie à quelque chose d’artistique ou de créatif qui te comble et qui fasse en sorte que cela te définit essentiellement. Le reste est accessoire ou alimentaire :-)


Mado

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